Assez décodé !
Site de René Pommier |
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………Galéjades On peut être un pisse-froid et attraper une chaude pisse. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * À Miami tout le monde fait ami ami. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Robert Pissengrain avait sans cesse des calculs urinaires. N’ayant pas un esprit très rationnel, il était convaincu que son problème était lié à son patronyme. Il demanda donc à en changer et opta pour Pissalaise, persuadé qu’il en aurait désormais fini avec les calculs et n’aurait plus jamais le moindre problème urinaire. Mais comme on peut bien le penser, cela ne changea rien à rien. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Jules avait toute sa vie aimé citer des vers. Et bien qu’il eût la maladie d’Alzheimer, il continuait encore à le faire. Mais ses citations étaient pour le moins approximatives. Il avait beaucoup aimé Ronsard et regrettait de ne plus se rappeler qu’un seul vers : ……« Cueillez dès aujourd’hui les fleurs par la racine » Quand il voulait citer le vers de Baudelaire : ……« Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir » celui-ci devenait : ……« Ton souvenir en moi lui comme un vieux bougeoir. » tandis que le vers : ……« Le violon frémit comme un cœur qu’on afflige » se transformait en : ……« Le piano gémit comme un rafiot rouillé » Le vers qu’il avait sans doute le plus cité : ……« La fille de Minos et de Pasiphaé » devenait : ……« Le fils de Barenboïm et de Lily Laskine » Son poète préféré était Victor Hugo, mais on avait quelque peine à reconnaître les vers fameux de « À Théophile Gautier » : ……« Oh quel farouche bruit font dans le crépuscule »
lorsqu’on l’entendait déclamer : ……« Ah ! quel affreux potin fait au petit matin »
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Dans les maisons de retraite, les couples de vieillards évoquent volontiers entre eux leurs souvenirs communs. Cela donne parfois lieu à des dialogues assez surréalistes comme en témoigne celui que le directeur de l’un de ces établissements, dont je n’ai aucune raison de mettre en doute la parole, m’a assuré avoir entendu un jour : « Tu t’en souviens, Grégoire, de la raie au beurre noir, qui nageait tristement au fond de la baignoire, t’en souviens-tu, Grégoire ? » — « Et la langouste que tu donnais au kangourou qui nous apportait le courrier, tu t’en souviens, Ursule ? » ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le mollah Omar avait complètement perdu la boule, du moins aux yeux des autres mollahs. Il arpentait la mosquée à grand pas en marmonnant avec rage : « J’en ai marre de Mahomet. C’est un semeur de merde, le plus grand semeur de merde que la terre n’ait jamais porté. J’en ai marre du Coran et de ses conneries. J’en ai marre d’Allah. Vive Alphonse Allais ! ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Vaut-il mieux se prendre un citron en pleine tronche ou une citrouille en pleine bouille ? ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Émile prétendait être un grand lecteur. On avait pourtant quelque peine à le croire lorsqu’il citait ses œuvres préférées : Si le groin ne mord, La Cousine Blette, Le Cousin pionce, Les trois moustiquaires, Eugénie glandait, mais, ajoutait-il, c’est Le Cidre qu’il mettait au-dessus de tout. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Rostislav maîtrisait mal le français. Un jour qu’il se sentait l’estomac barbouillé, il demanda l’adresse d’un gastéropode. Un autre jour, il voulut s’adresser à un pneumologue pour changer ses pneus. Quand il sortait le matin de sa douche, il disait toujours qu’il était propre comme un sous-off. Il partait souvent en retard pour aller à son travail, mais, disait-il, il allait prendre un court-circuit. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Quand lui annonçait la visite de l’aigle de Meaux, le cygne de Cambrai ne pouvait s’empêcher de lâcher le mot de Cambronne. Car ces deux oiseaux ne s’aimaient guère. L’aigle de Meaux ne cessait de se moquer d’une grenouille de bénitier que le cygne de Cambrai avait pris sous son aile. Il affirmait, non sans raison, que cette grenouille avait un grain et qu’il fallait lui interdire de coasser. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Comme Bernardin de Saint Pierre je crois qu’un évident finalisme anthropocentrique se manifeste sans cesse dans la nature. Ainsi, quand il neige, on ramasse facilement une pelle dont on peut aussitôt se servir pour déneiger. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Les bonnes âmes qui s’indignent du sort des SDF oublient simplement que ces gens-là ont pour la plupart des noms à coucher dehors. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Il est vivement déconseillé, quand on est agressé, de prendre son courage à deux mains : mieux vaut que celles-ci restent libres. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Cécile et Lucien s’enlaçaient sans cesse, puis ils se lassèrent et enfin se laissèrent. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * L’hippopotame aime à papoter avec ses potes ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Aux Caraïbes, il fait une chaleur caraïbinée. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Pour éviter les coups d’escopette, rien ne vaut la poudre d’escampette. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Olivier avait choisi de faire sa thèse sur la libido des colibris qui était, selon lui, particulièrement débridée. Mais la soutenance se passa mal. Un des membres du jury, éminent ornithologue et spécialiste des colibris, affirma que leur libido était parfaitement normale. Il ajouta qu’en revanche celle des olibrius, elle, était effectivement tout à fait débridée. Et, à l’évidence, Olivier était un olibrius, le choix de son sujet de thèse suffisait à le prouver. Il avait donc indûment attribué aux colibris une sexualité semblable à la sienne. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Je n’ai jamais reçu de lettre anonyme, ce qui m’a évité d’avoir à me poser la question toujours très délicate de savoir s’il fallait répondre. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Dans les maisons de retraite, celui qui a été une grosse légume n’est souvent plus qu’un légume parmi d’autres. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Dès qu’il avait été élu, le Saint Père s’était mis à grossir. Au bout de quelques mois, il était devenu carrément obèse. Les médecins se perdaient en conjectures, car c’était un ascète et il mangeait vraiment très peu. Curieusement le pape, lui, n’avait pas l’air de s’étonner le moins du monde de ce phénomène, comme s’il en connaissait parfaitement la cause. Les cardinaux les plus proches de lui essayèrent très respectueusement de l’interroger, mais il éludait soigneusement leurs questions. Mais il aimait beaucoup les petits enfants et répondait toujours à leurs questions lorsqu’ils lui en posaient. Ce qui devait arriver arriva donc. Un jour un petit garçon lui demanda innocemment pourquoi il était si gros, et le Saint Père avoua : « C’est le Saint Esprit. Il me gonfle ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Pauline, son énorme popotin posé sur un énorme potiron, papotait avec ses copines. Mais de quoi papotaient-elles, Pauline et ses copines ? De capotes, de leurs potes et de leurs pines. Tout en faisant la popote, Paul papotait avec ses potes. Et de quoi papotaient-ils, Paul et ses potes ? Des putains qu’ils se tapaient et de leurs popotins. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Bernard Dubouffon avait un goût prononcé pour l’humour noir que ne partageaient pas tous les pensionnaires de la maison de retraite qu’il dirigeait. Certains d’entre eux n’appréciaient guère les petites affichettes qu’il se plaisait à placarder un peu partout dans l’établissement : ……« Évitez de décéder d’un AVC dans les WC, SVP. » ……« Veillez à ne pas décéder un dimanche ou un jour férié. » ……« Quand vous décédez, ne manquez pas de le signaler aussitôt à la réception. Mais, si vous décédez pendant la nuit, attendez qu’il fasse jour avant d’appeler. » ……« Pour éviter de perturber les autres pensionnaires, vous devez impérativement ne pas décéder ailleurs que dans votre chambre en veillant à ce que la porte soit bien fermée. Nous comptons sur votre compréhension. » ……« N’attendez pas d’être à la dernière extrémité pour décéder. Il faut savoir se décider à décéder. » ……« Ne choisissez pas pour décéder le jour où l’on vient de changer vos draps. » ……« Ne profitez pas de vos derniers instants pour essayer de vous rendre intéressant. Il fallait y penser avant. » ……« Lorsque vous décédez, ne vous éternisez pas. Vous aurez ensuite tout le temps pour cela. » ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Hubert était bègue et l’on avait souvent bien du mal à le comprendre. On était parfois étonné de l’entendre parler d’une « banane alitée », d’un « car à rabbins » ou d’un « pipi au lait, mais on l’on devinait vite qu’il voulait parler d’une « banalité », d’un « carabin » et d’un « piolet ». S’il se plaignait du popotin de sa voisine, on croyait d’abord qu’elle était obèse, avant de se rendre compte qu’il la trouvait trop bruyante. Mais on devait reconnaître que son défaut d’élocution rendait bien des mots plus expressifs comme ababasourdi, atrotrocité, cacacographe, cacalamité, déblablatérer, écracrabouiller, gagateux, glouglousser, pipicrate, pipisser ou ridicucule. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le vieil homme de lettres mettait les fables de la Fontaine au-dessus de tout. À l’instar de José Corti, il aurait voulu écrire un treizième livre de Fables, mais il n’avait réussi à trouver que les titres : La Girafe et la Fourmi, Le Lièvre et la Morue, La Carpe et le Lapin, Le Rat d’égout et le Chat de gouttière, Le Cabri et le Colibri, Le Kangourou, la Langouste et l’Orang-outang, Le Coq et l’Âne, Le Citron et la Citrouille, Le Cheval à principes, Le Pied d’argile et le Bras de fer, La Grenouille de bénitier et la Punaise de sacristie, L’Éléphant qui voulait jouer de l’Olifant, L’Aigle de Meaux et le Cygne de Cambrai, Le Lama et la Limace, L’Olibrius et le Colibri, Le Cochon et le Cornichon, le Crapaud et l’Escargot, Odile et le Crocodile, Le Zèbre et la Gazelle, Le Boa qui n’avalait que des Couleuvres, La Pintade pintée, Le Python dépité, Le Babouin et le Bédouin, Le Pickpocket et le Kangourou. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Dans les maisons de retraite, il est souvent difficile de deviner ce que veulent dire certains pensionnaires. Ainsi, quand quelqu’un vous dit : « Je donne ma langouste au chameau », on peut ne pas comprendre tout de suite qu’il veut vous dire : « Je donne ma langue au chat ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Foncièrement Alphonse était un fonceur, mais il ne fonçait jamais, car il était toujours défoncé. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Depuis quelques jours, l’écho était détraqué. Il répondait toujours, mais de plus en plus librement. Si l’on criait : « Holà », il répondait : « Allo ». Si l’on criait : « Bonjour », il répondait : « Bonsoir ». Manifestement il se foutait du monde. Si, en s’énervant, l’on finissait par lui crier : « Ta gueule », il répondait : « Dégage ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * On se demande souvent pourquoi les baleines se suicident. Quoi d’étonnant pourtant qu’un cétacé en ait assez ? ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Hélène haletait en allaitant, elle haletait si fort que le téton échappait sans cesse aux lèvres de son bébé. Il s’entêtait pourtant à tenter de téter, mais il avait d’autant plus de peine à y arriver que, précocement doté d’un sens du comique particulièrement développé, il ne pouvait s’empêcher de se marrer comme une baleine. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Clovis ! t’as pas vu mon clitoris ? – Clotilde ! ton Clitoris, Médor a dû le manger. Il n’en finit pas de se pourlécher les babines avec délectation. Tu n’aurais jamais dû le laisser te lécher la chatte. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Il n’est jamais trop tard pour se mettre à la cithare. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Comme chacun sait, Spinoza se nourrissait exclusivement de lentilles qu’il polissait une à une avec le plus grand soin. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Les chartreux fabriquent de la chartreuse et les carmélites des caramels. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Les deux cousins causaient sans cesse. Ils causaient, ils causaient et de quoi causaient-ils, les deux cousins ? De choses et d’autres, et surtout d’autres d’ailleurs, sur lesquelles ils n’étaient jamais d’accord. De propos décousus en propos décousus, ils en venaient toujours à en découdre et se retrouvaient aux urgences pour se faire recoudre. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le directeur de la maison de retraite ne savait plus où donner de la tête. Son établissement était plein, la liste d’attente était très longue et c’était tous les jours un incessant défilé de personnes qui souhaitaient inscrire un de leurs parents. Il fit donc installer dans le hall d’entrée un grand panneau avec cette affiche : ……« Avis aux nouveaux pensionnaires. » ……« Pour le bon fonctionnement de l’établissement, il est préférable de ne pas décéder trop rapidement après votre arrivée, comme cela se produit de plus en plus souvent. » ……Le résultat fut tout à fait concluant. Il n’y eut plus aucune demande d’inscription et tous ceux qui étaient sur la liste d’attente ne tardèrent pas à se faire désinscrire. Au bout de quelque temps un pensionnaire mourut et ne fut pas remplacé. Il y en eut un deuxième, puis un troisième, et, comme c’était prévisible, le rythme des disparitions s’accéléra peu à peu jusqu’au jour où plus de la moitié des chambres restèrent inoccupées. Le directeur alors décida de réagir. Il fit enlever l’affiche et en fit mettre une nouvelle ainsi conçue : ……« Bienvenue aux nouveaux pensionnaires. » ……« Ici vous avez toutes les chances de devenir centenaires.» ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Hubert bégayait et l’on avait souvent bien du mal à le comprendre. On était parfois étonné de l’entendre parler d’une « banane alitée », d’un « car à rabbins » ou d’un « pipi au lait, mais on l’on devinait vite qu’il voulait parler d’une « banalité », d’un « carabin » et d’un « piolet ». S’il se plaignait du popotin de sa voisine, on croyait d’abord qu’elle était obèse, avant de se rendre compte qu’il la trouvait trop bruyante. Mais on devait reconnaître que son défaut d’élocution rendait bien des mots plus expressifs comme ababasourdi, atrotrocité, cacacographe, cacalamité, cacapipilotade, cacatastrophe, déblablatérer, ébabahi, écracrabouiller, gagateux, glouglousser, pipicrate, pipinasse, pipisser ou ridicucule, (compléter) (redite ?) ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Quand ses parents lui avaient proposé de faire de l’aviron, Robert avait refusé net, car il avait toujours entendu dire que les rameurs s’ennuyaient ferme. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Quand on est enrhumé, on ne se sent pas bien. Mais c’est bien normal puisque l’on a le nez bouché. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le directeur de la maison de retraite Les Tilleuls, qui trouvait que ses pensionnaires manquaient souvent de retenue au moment de décéder et faisaient inutilement durer les choses, décida de créer, décernée bien sûr à titre posthume, une médaille du décédé sur laquelle étaient gravés ces mots : « Célérité et discrétion sont les deux marques d’un décès réussi ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le jeune Charlie séchait souvent le catéchisme pour aller en catimini chez Cathy, une catin décatie qui avait quelques beaux restes qu’on pouvait dénicher pour quelques clopinettes jusqu’au jour où, s’étant attardé plus que de coutume, il vit arriver le curé qui avait fini son catéchisme. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Jules n’avait pas laissé d’instructions pour ses funérailles, mais, comme il était cracheur de feu, ses proches le firent incinérer. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * À Sainte Anne il n’y a jamais de guêpes. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Quand on va à Agen, il vaut mieux mettre un gilet pare-balles. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Bon Dieu quelle escapade ! Que ces Carpates sont escarpées ! disait le pape à quatre pattes. Il est grand temps que je me carapate. J’aurais mieux fait d’aller pêcher des carpes à Carpentras sans écouter le Saint Esprit. Il veut toujours que je prenne de la hauteur, mais, lui, il est toujours dans les nuages et ça ne lui réussit pas. Les chrétiens ne le sentent pas. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Le nouveau séminariste ne tarda pas à inquiéter sa hiérarchie. Le premier avril, il se leva de très bonne heure et réveilla tout le monde en criant : « Christ est ressuscité ». Le jour de Pâques, il fit une tête d’enterrement et chantonna d’une voix lugubre le Dies irae toute la journée. Le jour de l’Ascension, bien que le temps fût menaçant, il passa toute la journée dehors, à regarder vers le ciel. Il ne se décida à rentrer que tout à la fin de la journée, en disant qu’il n’avait rien vu et que l’opération avait sans doute été remise à cause des mauvaises conditions atmosphérique ». Le jour de la Pentecôte, il se mit une langue de bœuf sur la tête et s’abandonna toute la journée à la glossolalie la plus débridée. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Tantine offrait volontiers ses tartines à tante Anne qui lui prêtait ses tatanes et Tantine essayait de manger les tatanes de tante Anne tandis que tante Anne essayait d’enfiler les tartines de Tantine. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Henri avait été un grand cinéphile, mais il n’avait plus toute sa tête et quand on lui demandait quel était son film préféré, il répondait : Le Facteur aboya trois fois. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Au moindre danger Jules s’empressait de prendre son courage à deux mains pour aller au plus vite le mettre en lieu sûr. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Maurice Matuvu bassinait les autres pensionnaires des Hespérides en citant à tout propos les noms de tous les gens célèbres qu’il prétendait avoir connus. Il citait de grands musiciens comme le pianiste Arthur Rubatowski. D’illustres divas comme Thérésa Trémolo, Cosima Couac ou Ursula Ululandola. De grands chanteurs comme le ténor Orlando Roucoulando, la basse Boris Borborigmovitch ou le haute-contre Edgar Glapisson. Des peintres renommés comme Albert Dupinceau ou André Delatoile. Des écrivains très connus comme Philippe Lairsot ou Christian Nigot. Des intellectuels très médiatiques comme l’inévitable Bernard Henry Delahautélite. D’éminents hommes d’Église de toutes confessions comme les cardinaux Carlo Rosso et Paul Pouponrose, monseigneur Robert des Burettes, le chanoine Antoine Chafouin, le père Untantinettantouze, l'abbé Frétillon, de l’Académie française, le grand rabbin Jacob Kichicachair, le mollah Omar Maboul. Des célébrités du monde médical, comme le professeur Ricardo Vasculari, un des grands maîtres de la chirurgie cardiaque, le professeur Etore Torticoli, grand spécialiste des vertèbres cervicales ou le professeur Taketoshi Takachiémou, grand ponte de la constipation. De grands cuisiniers comme Émile de la Mijotière ou Gilbert Grandechère. De grands brasseurs d’affaires peu scrupuleux comme Bernard Tapinois ou Albert de la Manigance. Des huiles de l’industrie cosmétique comme Cyril de Ricin. De célèbres avocats politiciens à la moralité douteuse comme Roland Mocassin. Des membres du grand banditisme comme Arturo Trucidatore ou Dédé Le Dézingueur. De fameux coureurs de jupons comme Oscar Lakeuhaute ou Dominique Troussetout. Des représentants de la vieille noblesse française, comme Serge de la Serpillière et Patrice de la Taupinière, dont certains étaient passablement désargentés, comme Thierry de la Pierre-qui-Roule. De grands noms de l’aristocratie romaine comme la princesse Lapilazuli, les Tutti Quanti ou les Coussi-Coussa dont il se disait le cousin. Des russes blancs richissimes comme Grégory Bougrovitch, Trophime Troufignovitch, ou Petrovna Pouffiaskaïa. De grandes cocotes de petite vertu comme Olga Gourgandina ou Eugénie Gronichon. Mais le nom qu’il citait le plus souvent et avec lequel il assommait littéralement les autres pensionnaires était celui du général Massu. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Booz s’était couché complètement bourré.
Rarement un vieillard fut aussi répugnant.
Il était ladre autant qu’il était délabré.
Mais pour rebuter Ruth il en fallait bien plus.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤* * * Les pensionnaires de la maison de retraite avaient tous depuis longtemps perdu la tête. Certains ne parlaient plus du tout. Les autres ne prononçaient plus qu'une seule et même phrase qu'ils répétaient à intervalles variés à longueur de journée. Le vieil amiral marmonnait : « On n'a pas toujours un sous-marin sous la main ». L'auteur de romans policiers disait sur un ton sinistre : « Son sang ne fit qu'un tour et ce fut le dernier ». L'ex surveillant de collège hurlait : « Assez papoté ! les potes, il faut potasser ». Le vieux saharien s'exclamait d'un air outré : « En voilà des manières pour un dromadaire ! ». L'ancien chef de cuisine hochait la tête en murmurant : « Salé, ça l'est. Mais l'est-ce assez ? » Le spécialiste de la mythologie grecque prévenait ses compagnons : « La Pythie a pété : il va faire de l'orage ». Le latiniste qui avait fait une thèse sur César avouait: « Je suis venu, j'ai vu et ne m'en souviens plus ». L'ancien dirigeant d'une association d'aide aux immigrés interpellait tous ceux qu'il croisait dans les couloirs en leur disant : « Où portes-tu tes pas, pathétique apatride ?». L'ingénieur du son bredouillait d'un air perplexe : « De temps en temps se fait entendre un bruit étrange ». Le crémier disait d'une voix émue : « Le dernier jour, à la fin des temps, s'il reste encore du fromage, j'en reprendrai ». Le vieux rabbin, qui était très radin, exprimait toujours le même regret : « Le boudin, c'est pas cher, mais c'est pas casher ». L'ancien pensionnaire de la Comédie française déclamait d'une voix encore puissante : ……« Je le ferais encor si j'avais à le faire
Le vieil universitaire, éditeur de Proust, confiait : « Longtemps je me suis levé aux aurores ». Le plus sensé, un vieux poète, disait sur un ton résigné : « Je suis sur le chemin qui descend vers la nuit » ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Était-ce Estelle ou était-ce Esther ? Les deux jumelles se ressemblaient de façon telle qu'on ne pouvait les distinguer qu'à l'odeur, car Estelle puait des aisselles tandis qu'Esther empestait l'éther ou à l'oreille, car Estelle avait une voix de crécelle, et Esther, une voix de stentor. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * La souris grise avait trop bu. Dès qu'elle vit le chat, elle courut vers lui. Celui-ci, qui n'avait encore jamais vu de souris se précipiter vers lui, s'enfuit à toute vitesse. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il pouffait, il pouffait, il pouffait. C'était un pouffeur né, un pouffeur invétéré, un véritable pouffomane, un pouffomaniaque compulsif. Cela n'allait pas sans inconvénients Il pouffait en se rasant et il se coupait, il pouffait en mangeant et il s'étranglait, il pouffait en dormant et il se réveillait, il pouffait en faisant l'amour et il débandait, il pouffait en pissant et il arrosait ses pantoufles. Parfois le soir, quand il était fatigué d'avoir pouffé toute la journée, il se contentait de dire d'une voix lasse : « je pouffe ! je pouffe ! » Il mourut en pouffant et tous ses proches poussèrent un « Ouf ! » ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le docteur Robert Obstétricaud avait révolutionné la pratique de l'accouchement. Alors qu'avant lui, tous les accoucheurs et toutes les sages femmes s'obstinaient à répéter inlassablement « poussez ! poussez !» à leurs patientes, il avait eu, un jour où il était d'humeur bouffonne, l'idée de leur dire « pouffez ! pouffez ! » et s'était rendu compte que cela permettait d'abréger sensiblement la durée des accouchements. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Comme son nom l'indique, Tony était truand. C'était pourtant un truand bon enfant. Comme tout bon truand, il trucidait des gens. Mais il se montrait toujours très prévenant. Il surinait en souriant aimablement. Il strangulait en fredonnant une berceuse. Il prenait toujours soin d'ôter sa casquette avant d'appuyer sur la gâchette. Et il ne manquait jamais d'aller aux enterrements de ses victimes, sauf lorsqu'un travail urgent l'en empêchait, auquel cas il faisait envoyer des fleurs. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * On disait Elie laid, aussi laid qu'un Silène. Mais si laid l'était-il ? se demandait Hélène qu'Elie hélait à perdre haleine d'aussi loin qu'il la voyait : « Hélène je t'hèle ! Je t'hèle, Hélène ! » Car il n'aurait jamais osé lui dire : « Hélène je t'aime », mais il espérait bien qu'elle comprendrait. Elle comprenait, en effet, et elle lui criait : « Elie, hèle Hélène ! Elie, hèle Hélène ! Hélène aime qu'on l'hèle ! Hélène aime qu'on l'hèle ! Elle aime qu'Elie l'hèle ! Elle aime qu'Elie l'hèle !». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il ne se nourrissait que de boudin, blanc ou noir, suivant son humeur. Et, fort heureusement, son humeur était presque toujours sombre. Car il n'aurait jamais eu les moyens de se payer tous les jours du boudin blanc. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * D'une main, André Breton saisit son stylo et, de l'autre, il prit son courage à deux mains et se mit à écrire très vite, sans dessein préconçu, en se disant qu'il ne devait surtout pas se relire. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il avait la maladie d'Alzheimer et, comme il était bouddhiste, il ne se souvenait plus que de ses vies antérieures. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le pharmacien lui demanda sa carte vitale. Il sortit son portefeuille, mais ne la trouva pas et, comme il était à la fois cardiaque et très superstitieux, il tomba raide mort. Le pharmacien la retrouva tout de suite dans la poche droite de son veston et, s'emparant d'un cornet acoustique, il le mit dans l'oreille gauche du mort (c'était la meilleure), et hurla : « Je l'ai ! Je l'ai ! ». Mais c'était trop tard. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le Père Robert Ronronnard, que l'on surnommait le prédicateur des rombières, était un prédicateur très recherché dans les beaux quartiers. Sa hiérarchie avait pensé l'envoyer convertir les populations de je ne sais quelle contrée d'Afrique où, pensait-elle, il ferait des merveilles. Mais il avait refusé d'un air outré. Se réclamant de saint François qui prêchait aux poissons, il avait choisi de se consacrer tout entier aux grenouilles de bénitier. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Comme beaucoup d'aveugles, il avait la mauvaise habitude d'acheter les yeux fermés. Et cela parfois n'allait pas sans inconvénients. Ainsi, chaque fois qu'il devait changer l'ampoule de sa lampe de chevet (il lisait généralement assez longtemps avant de s'endormir), il achetait régulièrement soit une ampoule beaucoup trop faible ce qui lui tirait les yeux, soit une ampoule beaucoup trop forte qui l'éblouissait. C'était d'autant plus fâcheux, que, comme on peut bien le penser, il avait les yeux particulièrement fragiles. Inutile de dire qu'il passait son temps chez son ophtalmo qui, à chaque fois, lui changeait ses lunettes. Et cela lui coûtait cher, car, à cette époque, les lunettes pour les aveugles n'étaient pas encore remboursées par la Sécurité sociale, en dépit de toutes les réclamations du syndicat CGT des aveugles. Heureusement pour lui, sa mutuelle n'était pas très regardante et lui en remboursait quand même une partie ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il était très précautionneux et il avait soigneusement préparé son voyage. Pourtant, dès qu'il fut arrivé au Sahara, il s'aperçut qu'il avait oublié son parapluie. Il chercha aussitôt à en acheter un. Malheureusement aucun marchand n'en vendait et les très rares personnes qui en possédaient n'étaient nullement disposées à s'en séparer. Bien sûr, s'il pleuvait, il pourrait toujours se mettre à l'abri sous un chameau. Mais, même au Sahara, on ne peut être absolument certain d'avoir toujours un chameau sous la main. Il jugea donc qu'il serait plus sage d'en louer un qui le suivrait pendant tout son séjour. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Éric prenait toujours son courage à deux mains et il en faut du courage pour prendre son courage à deux mains quand on est manchot. Mais il n'était pas homme à baisser les bras, lui qui aimait à dire : « Ce n'est pas parce que l'on est manchot qu'il faut se mettre à croiser les bras ». ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il se leva plein d'enthousiasme : il avait enfin trouvé sa vocation qui se résumait dans cette fière devise : « J'irai foutre la merde aux quatre coins du monde ». Mais, en sortant de chez lui, il glissa sur une crotte de chien et fit une chute si malencontreuse que sa tête, au demeurant fragile, heurta violemment le bord du trottoir. Il mourut sur le coup. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Au restaurant, je ne commande jamais un éléphant farci : je sais par avance qu'il y aura tellement de farce que l'on ne sentira plus du tout le goût de l'éléphant. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Dédé était décédé d'un AVC dans les WC. Outre ses DDD (douleurs diffuses diverses) habituelles, il avait eu la veille quelques MMM (malaises motriciels momentanés), un certain nombre d'EEE (étourdissements épisodiques éphémères), et quelques crises d'III (irritation intempestive intermittente), mais son médecin ne s'était vraiment inquiété. Il avait conclu à une AAA (anémie accidentelle anodine) qui avait occasionné une DET (difficulté d'être temporaire). Mais il n'avait pas vu qu'il s'agissait, en réalité, d'une DER (difficulté d'être rédhibitoire), signe avant-coureur d'une proche IETD (impossibilité d'être totale et définitive). ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Quand elle n'était pas en cure de mélassothérapie à Gadoue-les Bains, Mélanie Landouille partageait son temps entre son piquouillothérapeute, son tripotothérapeute sans oublier, bien sûr, son papotothérapeute qui l'écoutait distraitement sans piper mot, mais qui lui piquait beaucoup de pèze. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Sa mère était morte en le mettant au monde. Quant à lui, son cerveau avait beaucoup souffert pendant l'accouchement. On ne put jamais lui apprendre à parler. Il vécut jusqu'à plus de quatre-vingts ans sans jamais prononcer un seul mot. Il mourut des suites d'une longue maladie, mais, juste avant de rendre l'âme, il se redressa sur son lit, et dit très distinctement et d'une voix claironnante : « Par ici la sortie !», avant de retomber sans vie sur son oreiller. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Félix Lajoie était d'une nature résolument optimiste. Cette heureuse disposition s'était manifestée dès la naissance, car, au lieu de se mettre à crier comme tous les nouveaux nés, il avait éclaté de rire. La sage femme qui le portait avait été tellement stupéfaite qu'elle l'avait laissé tomber par terre ce qui avait aussitôt déclenché chez lui une crise de fou rire si violente que l'on avait craint qu'il ne s'étouffât. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Tous les quarts d'heure environ, sans raison apparente, Félix Coué disait en se frottant les mains : « C'est toujours ça de pris ». Et à ceux qui, ne le connaissant pas, lui demandaient pourquoi il disait cela, il répondait que c'était bon pour le moral. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le commissaire principal se pencha sur le mort qui ne portait aucune marque de coups ou de blessures, prit son portefeuille, l'ouvrit et se releva perplexe : la carte vitale avait disparu. C'était déjà la cinquième fois que pareille chose lui arrivait et le phénomène commençait à prendre des proportions très inquiétantes. Il devenait tous les jours un peu plus évident que des malfaiteurs, qui appartenaient certainement au milieu du grand banditisme, avaient imaginé ce moyen très commode et fort peu risqué d'éliminer ceux qui les gênaient : dérober leur carte vitale et la détruire, avec la conséquence que l'on devine. Il fallait donc au plus vite, entreprendre des recherches pour arriver à créer une carte vitale totalement indestructible. Mais, comme on s'en doute, la chose s'annonçait devoir être très malaisée ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le vieux militaire avait définitivement perdu la tête. Il arpentait du matin au soir les couloirs de la maison de retraite en chantant à pleins poumons, car hélas ! il était encore robuste : ……Quand je suis passé quelque part,
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Amélie passait le plus clair de son temps chez son mamelloplasticien. Elle avait toujours eu un gros problème avec ses seins. Elle avait beau les palper sans cesse, elle ne les « sentait » pas. Elle avait l'impression qu'ils ne lui appartenaient pas. Son mamelloplasticien, qui tenait à conserver sa meilleure cliente, se gardait bien de lui dire que c'étais sans doute psychologique et qu'elle ferait mieux de ne plus y penser. Il lui disait, au contraire, que c'était une véritable maladie, rare, mais connue, sur laquelle un des ses confrères avait publié dans une revue professionnelle un article intitulé « L'étrange sentiment d'irréalité mammaire ». Il n'y avait qu'un seul traitement : un massage intensif qui, à la longue, ne manquerait pas de donner des résultats. Il lui donna donc des rendez-vous de plus en plus rapprochés et lui demanda des prix de plus en plus élevés jusqu'à devenir tout à fait exorbitants, sans qu'elle éprouvât pour autant la moindre amélioration. Exaspérée, elle finit un jour par l'assommer en lui donnant un grand coup sur la tête avec son sein gauche (elle était gauchère) et fut aussitôt guérie, du moins en ce qui concerne le sein gauche car elle ne sentait toujours pas le droit. Elle retourna donc chez son mamelloplasticien et se livra à la même opération, mais cette fois-ci avec le sein droit, et de nouveau avec un plein succès. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * De temps à autre, Léon hurlait : « Léon ! Léon ! » À ceux qui s'en étonnaient, il répondait « Je m'hèle, je m'hèle », et il expliquait que, quand il était enfant, on lui criait dans l'oreille, car il était un peu sourd : « Hèle toi le ciel t'hèlera ». Mais, ajoutait-il un peu tristement, jusque-là le ciel n'avait jamais daigné l'héler. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * C'était le jour de Pâques et patatras ! le pape était patraque. Il parut quand même au balcon de Saint Pierre, mais, quand il voulut dire : « Christ est ressuscité », il fut pris d'une quinte de toux et manqua s'étouffer. Il fallut le prendre par les pieds et le secouer violemment par-dessus le balcon jusqu'à ce qu'il recrache une colombe qui alla aussitôt se percher au sommet du dôme. Sur la place saint Pierre, l'émotion fut inimaginable. Plusieurs bonnes sœurs s'évanouirent et l'une d'entre elles mourut de saisissement. Tous les journaux consacrèrent leur une au miracle en oubliant de mentionner le décès de la bonne sœur. Sa conduite inconsidérée fut sévèrement jugée par les autorités religieuses et elle fut enterrée en catimini.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il ne reculait jamais devant une occasion de faire une blague de mauvais goût. Chaque fois qu'il passait devant une maison de retraite, il se présentait à l'accueil et demandait à acheter des tomates, des haricots verts ou des choux de Bruxelles. Et quand on lui disait qu'il était dans une maison de retraites et non dans un magasin de primeurs, il répondait en faisant l'étonné : « On m'avait pourtant dit que vous aviez un grand choix de légumes ».
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Tout le monde avait été surpris quand il était entré au séminaire, mais on l'avait accueilli avec joie. Même si elle constituait une source d'inquiétude, son intelligence exceptionnelle en faisait une recrue inespérée, car le niveau intellectuel des séminaristes, qui n'avait jamais été très brillant, avait une fâcheuse tendance à être de plus en plus médiocre. Au début tout se passa très bien. Mais assez vite, il se mit à donner divers signes d'impatience et d'agacement : petits ricanement intempestifs, légers haussement d'épaules ou gloussements déplacés. Les choses se gâtèrent sérieusement lorsqu'il se mit arpenter les couloirs en criant à tue-tête : « Jésus, Marie, Joseph, ah ! quels connards vous faites ! Jésus, Marie, Joseph, ah ! quels connards vous faites ! ». Noel arriva sur ces entrefaites, et, à minuit, dans la chapelle, il se prit à chanter à pleins poumons : « Il est né le divin benêt. Chantons tous le sacré couillon ». C'en était trop. On le pria de déguerpir. Il en parut très surpris et déclara qu'il regrettait de quitter le séminaire au moment où il commençait à vraiment bien s'y amuser.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il était parti de rien, mais il avait créé une petite entreprisee qui était vite devenue très florissante. Il proposait, en effet, un produit, ou plutôt, comme il disait sur sa publicité, un « concept », auquel personne n'avait encore jamais pensé alors qu'il faisait pourtant cruellement défaut : l'urinoir pour mérinos.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Joe avait été boxeur. Il se portait fort bien et était encore très vigoureux pour son âge. Malheureusement il était atteint de la maladie d'Alzheimer et il fallut le mettre dans une maison de retraite, ce qui ne tarda pas à poser un sérieux problème. Car, se croyant revenu au temps de ses exploits, il ne pouvait rencontrer un pensionnaire masculin sans se mettre aussitôt à le boxer. La direction songea d'abord à organiser des cours de boxe pour tous les pensionnaires masculins afin qu'ils pussent au moins essayer de se défendre. Malheureusement l'équilibre de beaucoup d'entre eux était si précaire que le seul poids des gants de boxe les faisaient tomber en avant, dès qu'ils essayaient de lever un bras. Il fallut chercher une autre solution et on finit par la trouver. À la différence de bien d'autres boxeurs, Joe n'avait jamais frappé d'arbitre, et on réussit à le persuader que tous les pensionnaires masculins étaient d'anciens arbitres de boxe.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le nouveau ministre de l'agriculture, qui sortait de l'ENA, croyait que les œufs durs étaient des œufs pondus par des poules constipées.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le vieux rabbin n'avait plus toute sa tête : il voulait à tout prix manger du boudin casher.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Il avait décidé de se convertir au christianisme, mais il était végétarien. Cela, bien sûr, lui posait un très gros problème. Il lui faudrait communier au moins une fois l'an, et ce faisant, à ce qu'on lui avait dit, consommer la chair du Christ. Il s'en ouvrit à un de ses amis qu'il avait toujours trouvé de bon conseil et lui demanda si les hosties, une fois consacrées, devenaient réellement des parcelles du corps du Christ. Son ami lui répondit : « C'est des salades ». Il n'en demanda pas plus. Il se convertit sur le champ et communia tous les jours.
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * L'abbé Aimé Dedieu aimait à taquiner la muse. Ses supérieurs n'y trouvaient rien à redire. Car l'on ne pouvait jamais rien déceler dans ses vers qui fût le moins du monde contraire à la foi et aux bonnes mœurs, comme on peut en juger par ces deux quatrains qu'il tenait pour son chef-d'œuvre :
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le mort était morose. On le serait à moins. Pourtant il paraissait d'humeur si sombre que sa femme se douta que quelque chose n'allait pas. Elle pensa d'abord que ses souliers vernis le gênaient (c'étaient ceux de son mariage) et elle les remplaça par des pantoufles. Cela ne changea rien. Finalement elle trouva : on avait oublié de lui mettre sa légion d'honneur. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Les pensionnaires de la maison de retraite, qui avaient presque tous la maladie d'Alzheimer, y mouraient extrêmement vite, à l'exception d'un homme qui faisait, lui, partie des meubles : il avait la maladie d'Althusser. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Malgré son grand âge, il se sentait tout rajeuni en sortant de chez son médecin. Celui-ci lui avait annoncé qu'il avait une maladie de longue durée. Et il se disait, qu'avec un peu de chance, il en contracterait peut-être bien une deuxième. Dans ce cas, lui avait dit, son médecin, il aurait toutes les chances de vivre au moins jusqu'à cent ans. Car la loi avait été changée et le décret d'application venait de sortir. Jusqu'à présent, en effet, quand on avait plusieurs maladies de cette catégorie, les durées ne s'additionnaient pas. C'était tout à fait injuste et le syndicat des malades atteints de plusieurs affections de longue durée, avait, comme il se doit, depuis longtemps protesté et organisé des manifestations devant le ministère de la Santé, en menaçant de faire une grève illimitée des maladies. Le ministre, Philippe Douste-Blazy, avait enfin cédé et pris la décision qui s'imposait. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * On s'en aperçut bien vite. Le nouveau pape était atteint, à un degré jusque-là inconnu, d'une affection spécifique à son état, la canonisomanie, ou canonisationis incontinentia, qui se caractérise par un besoin irrépressible de canoniser. C'était, en soi, une affection bénigne qui ne mettait nullement sa vie en danger, mais qui n'en présentait pas moins de grands inconvénients. Outre que cela faisait ricaner les incrédules, qui n'avaient déjà que trop d'occasions de le faire, beaucoup de membres du clergé, à commencer par les cardinaux du sacré Collège, considéraient, non sans raisons, que cette inflation sans précédent dévaluait singulièrement la dignité de saint. « Où est le temps, disaient-il, où, pour être canonisé, il fallait vraiment être un très grand cinglé, un allumé de première grandeur ? Où allons-nous, si un petit givré sans envergure, si le follet le plus insignifiant, peut prétendre à la sainteté ? ». Et certains membres de la Curie pensaient déjà à hâter le retour du Saint Père dans le sein d'Abraham. Mais il fallait, bien sûr, l'accord du Saint Esprit. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Les premiers romans de Gustave Suavinet, Le Bleuet jauni, Le Coquelicot mélancolique, La Salade esseulée, Le Berceau défraîchi, La Serpette de mon grand-père, La Serpillière de ma grand-mère, avaient rencontré un grand succès populaire. Mais, il venait de l'apprendre, un critique très renommé l'avait traité de romancier à l'eau de rose. Furieux, il s'installa à sa table de travail, mit une feuille de papier sur sa machine à écrire et tapa rageusement le titre de son prochain livre : Du Sang sur le fromage blanc. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Ce fut plus fort que lui. Quand l'Aigle de Meaux après avoir marqué une légère pause, reprit le fil de son sermon en disant : « Et maintenant pénétrons plus avant dans les desseins de la divine Providence », le vicomte Aldebert de l'Esclafade, qui était passablement libertin, fut pris d'un fou rire inextinguible, et finit par se rouler par terre pour essayer de l'éteindre. Mais il ne put y arriver et le fou rire se propagea rapidement à toute l'assistance. Il finit même par gagner le prédicateur qui ne cessait de dire, entre deux quintes de rire : « Il fallait bien que cela arrivât un jour ! » ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * En se tortillant la barbe et en prenant un ton faussement gêné, Dieu dit à Abraham : « Je ne voudrais surtout pas t'influencer. Mais, si un jour, pour une raison ou pour autre, la fantaisie te prenait d'égorger ton fils, Isaac, je n'en serais pas autrement mécontent. Cela dit, c'est ton fils, et tu agis comme tu l'entends ». À peine il achevait ses mots qu'Abraham alla trouver Isaac pour lui dire d'aller l'attendre à la cuisine, debout devant l'évier, en penchant bien la tête en avant : il ne voulait surtout pas qu'il y eût du sang partout de peur que Sarah ne lui fît une scène. Puis il alla chercher dans sa resserre le grand coutelas dont il se servait pour tuer le cochon et se dirigea vers la cuisine où Dieu, qui l'attendait derrière la porte, l'assomma d'un coup de poing qui aurait pu suffire à tuer un bœuf. Mais, comme toute sa famille, Abraham avait la tête particulièrement dure. Il lui fallut pourtant un certain temps avant de pouvoir reprendre ses esprits pour entendre Dieu le traiter de brute dégénérée, d'abruti sanguinaire, de fanatique aussi odieux que stupide et prédire que sa descendance reculerait les bornes de l'imbécillité. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * La dépression du professeur de sciences naturelles du lycée Buffon commençait à prendre une tournure vraiment inquiétante. La veille, il avait écrit à son proviseur pour lui demander de faire remplacer le plus rapidement possible le squelette qui était dans sa salle de classe : il le trouvait décidément trop décharné. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Les homélies du père Tristounet étaient si mélancoliques que, le dimanche, en sortant de la messe de onze heures, les fidèles rentraient directement chez eux tout pensifs sans s'arrêter à la pâtisserie pour acheter des gâteaux. Le pâtissier finit par se plaindre à l'évêché qui était son meilleur client. Et le père Tristounet fut invité par son évêque à prendre tous les dimanches matins un antidépresseur. L'effet fut saisissant. Il se mit à faire toutes sortes de plaisanteries sur la Résurrection et la virginité de Marie, à tourner en dérision le péché originel, à dire que l'enfer était une fable, et à prôner la liberté sexuelle la plus absolue. Non seulement le pâtissier vit revenir tous ses clients, mais il leur vendit encore beaucoup plus de gâteaux. Hélas ! cela ne dura guère, car l'évêque ordonna au père Tristounet d'aller finir ses jours dans une maison de retraite pour ecclésiastiques. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * La bouille de l'abesse mangeant sa bouillabaisse était plaisante à souhait. C'était une pénitence que lui avait donné son confesseur qui n'en pouvait plus de l'entendre parler sans cesse de spiritualité et citer à tout propos Thérèse d'Avila et Jean de La Croix. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Le docteur Robert Obstétricaud avait révolutionné la pratique de l'accouchement. Alors qu'avant lui, tous les accoucheurs et toutes les sages femmes s'obstinaient à répéter inlassablement « poussez ! poussez !» à leurs patientes, il avait eu, un jour où il était d'humeur bouffonne, l'idée de leur dire « pouffez ! pouffez ! » et s'était rendu compte que cela permettait d'abréger sensiblement la durée des accouchements. Mais certains psychanalystes avaient critiqué sa méthode en soutenant que les bébés risquaient d'être profondément vexés de voir leur mère pouffer en les mettant au monde et que ce traumatisme initial pouvait entraîner de graves séquelles psychologiques. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Au début des Tragiques Agrippa d'Aubigné, pour dépeindre les malheurs de la France déchirée par les guerres de religion, a recours à une allégorie. Il représente la France comme une mère qui tient dans ses bras deux jumeaux lesquels se livrent à une bataille féroce, chacun d'entre eux voulant les deux nichons pour lui tout seul. Au lieu de se contenter de pousser des cris débiles et de maudire ses rejetons, cette mère aurait beaucoup mieux fait de les assommer l'un et l'autre en leur donnant un grand coup sur la tête avec ses nichons. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * ………Histoire triste À force de tirer le diable par la queue, elle lui resta dans les mains. Comme ile savait pas qu'en faire, il s'en servit pour se pendre. …… La dondon de Sidon ne veut pas pardonner
Au fond d'une forêt, Didon se morfondait
……………D'après Virgile : Enéide, VI, 450-476. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * ………Que de chichis fait l'Achille
Prends ta lyre illico, Muse, et chante nous l'ire
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * …… Electre reconnaît de son cher frère Oreste
………Oreste O toi, qui as la chance, en t'adressant aux dieux,
………Electre O allogène obscur ! je suis donc bien obtuse,
………Oreste ……………La perception optique
………Electre ……………Tu sais donc, étranger,
………Oreste Mon petit doigt le sait de reste : c'est Oreste. ………Electre Soit ! ton auriculaire a l'air oraculaire.
………Oreste Le pistolet qui t'obnubile, c'est bibi,
………Electre Bas les pattes ! Je crois que ce coco voudrait
………Oreste Il faudrait donc que je m'arnaquasse moi-même. ………Electre Songerais-tu à te gausser de mes malheurs ? ………Oreste Il faudrait que je me gaussasse aussi des miens. ………Electre Qu'ois-je donc ? Il y a de quoi en rester coie !
………Oreste ……………Je me tue à le dire.
………………………………(il expectore) ………Electre Oui, c'est lui tout craché ! O mollard péremptoire,
……………D'après Eschyle : Les Choéphores, vers 212-245 ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * 'Quel satané ramdam, ils font, tous ces damnés !'
Pivotant subito et portant ses regards
Comment le pourrait-on ? Derrière cette enceinte,
¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤ * * * Ah ! qu'Énée a de peine à s'y faire aux enfers ! Là s'ouvre le chemin qui va, dans le Tartare,
……………D'après Virgile, Énéide, VI, 295 sq.
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